Pour commencer. (21/09, 01h34)

Veiller tard, c’était pas permis en prison, du coup ça la change : elle le fait plus en mode rebelle, mais en tout légalité. Elle déambule talons à la main – dans une autre vie, une arme redoutable - dans les couloirs. De son autre main, elle tient un pan de sa robe pour ne pas se prendre les pieds dedans et s’étendre sur le sol comme une vieille merde. Surtout pas aux pieds d’un mec debout au milieu de la chambre qui est censée être la sienne. Jetant un coup d’œil autour d’eux, elle voit des lits simples, une douzaine : une chambre pour douze, elle hallucine. Elle n’a que rarement partagé sa cellule et elle a dormis à cinq dans une minuscule chambre… « Mattes la baraque et on peut même pas avoir une chambre tout seul ! » Elle souffle. En vérité, elle ne sait pas si elle est plus excédée par cette idée, ou en regardant les lits simples. Dormir à deux dans des lits séparés ça l’emmerde, mais dormir contre quelqu’un, ça manque. Paradoxe. Négligemment elle laisse tomber ses chaussures – c’est pas les siennes – dans la pièce avant de se mettre en quête de son lit : à la meilleure place. Pas proche du balcon : même s’il semble faire chaud ici, elle ne veut pas attraper la crève et c’est qu’elle en deviendrait p’tite nature. Pas à côté de la porte : on dit toujours que c’est les premiers à s’faire attaquer et même si ça n’arrive pas ici, c’est pas grave, autant pas. Elle passe alors devant le même mec qui semble pas vouloir se bouger, pour finalement tomber sur un des lits du milieu. « Parait qu’on fait connaissance dans ce cas-là. » De son franglais, elle l’invite à commencer. Devant leur télé à l’abris, les khouya devront bien rire de la voir tranquillement alors qu’elle n’a pas été apprise comme ça.

J'étais plutôt bien ici, je me sentais un peu mal à l'aise. Mais en même temps j'avais envie de profiter pleinement de cette demeure, puisque je savais que c'était la seule fois que j'allais pouvoir en profiter. Pour moi vivre dans une propriété comme celle-ci ce n'était pas possible, c'était comme un doux rêve. Et même quand je gagnais pas mal d'argent je n'arrivais pas à e payer une nuit dans une suite alors que pourtant je gagnais pas mal à l'époque. Les chambres étaient aussi très belles, c'est vrai que comparait à celle que j'avais à la prison c'était autre chose. Profiter d'un bon lit ça avait été le paradis, cette nuit je l'avais savouré comme jamais. Je n'étais pas réveillé par un maton, par un autre prisonnier, j'étais tranquille en train de dormir, mais pas seul, puisque qu'il faut être deux par lit. C'est alors qu'une jeune femme arrive, je ne dis rien et je l'écoute juste. Je suis bien dans l'obscurité, c'est reposant et j'aime être enveloppé du voile de la nuit. Mais cette jolie jeune femme venait de rompre ma tranquillité, je restais parfaitement immobile lorsqu'elle passa devant moi une seconde fois. Parce que je n'avais pas envie de parler, juste d'écouter et d'analyser un pantin de plus. Un que j'allais pouvoir manipuler, il fallait que je connaisse ses faiblesses, pas que je dévoile les miennes. « Il parait. Mais depuis quand des taulards se plient à un protocole ? » dis-je d'un ton neutre, même si au fond j'étais plutôt amusé. Je me foutais juste un petit peu d'elle, n'avais-je pas le droit de le faire ? Après tout ce n'était qu'un pantin non ? Elle n'était qu'un pantin que je devais éliminer comme tout les autres. J'ai toujours manipulé pourquoi est-ce que ça changerait maintenant ?

Elle essaie faire parler, mais il ne coopère pas assez. Elle parle pas en temps normal ou pas pour être gentille. Elle sait que si on a accepté de l’envoyer ici, c’est parce qu’elle pouvait faire des efforts : une espèce de consécration après ses années de yoga et autres trucs pour la calmer. Il se fout clairement de sa gueule et joue - elle a pas la science infuse, mais elle peut le comprendre facilement. Elle hausse ses épaules. « J’en sais rien. Et puis c’bon, j’te demande pas de me baiser les pieds… » Quoiqu’elle serait capable de le faire et de kiffer. Mais c’est pas sur qu’il accepterait. Pour tout dire, ça lui fait tout drôle ce moment même parce qu’il faut savoir qu’elle n’a pas parlé à un mec – autre que ses frères – depuis cinq longues années. Elle aurait pu espérer meilleure conversation mais soit. Se tournant vers le lit qu’elle avait désignée comme sien, elle tire le zip de sa robe pour s’en débarrasser et dévoiler sa peau seulement couverte d’une culotte. « Mais parle pas c’est pas la peine… J’sais que t’es White… » Elle a meilleure mémoire qu’elle semble avoir et est prête à tout pour dominer tout le monde. Alors si elle sait son nom, c’est pas parce qu’elle est en admiration, c’est pour mieux l’attaquer dans le temps du jeu. « Ca te pose pas de problèmes de t’appeler White en l’étant pas ? Blanc ? » Elle avouerait que c’est franchement drôle pour un presque renoi comme elle et elle éclaterait de rire si l’échange était plus courtois, parce qu’il est plus loin du White que du Black.